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Coral reefs

L’Indonésie comme épicentre de la biodiversité marine, mais qu’en est-il de ses projets de restauration corallienne ?

L’Indonésie comme épicentre de la biodiversité marine, mais qu’en est-il de ses projets de restauration corallienne ?
Publié par Coralie Barrier | Publié le 27 September 2022

Écrit par Coralie Barrier

Remerciements à Dr. Tries B. Razak

 

L’Indonésie héberge 16% de la superficie totale des récifs coralliens du monde, environ 39 550 km2 [1, 2]. Néanmoins, sur ces écosystèmes pèsent des facteurs de dégradation mondiaux et locaux. En particulier la pêche à la dynamite, bien qu’interdite depuis 1985 [4], menace l’état de 95% des récifs coralliens du pays [2], ainsi que les communautés qui en dépendent. Près d’un quart des Indonésiens vivent à 30km d’un récif corallien, constituant la population dépendante d’un récif la plus importante du monde [3].

Pour pallier ces menaces, des actions de restauration active des récifs coralliens sont mises en place depuis plusieurs décennies en Indonésie [2]. La première installation de récifs artificiels documentée a été réalisée par la marine indonésienne en 1979. Le but de celle-ci fut de réhabiliter un récif corallien au nord de Jakarta en immergeant des matériaux tels que des pneus pouvant servir de substrat stable pour la colonisation des coraux ou encore pour servir d’habitat à certains poissons [6]. Le nombre de projets ayant augmenté rapidement, en 2020, l’Indonésie faisait partie des quatre pays avec le plus de projets de restauration, selon la révision de Böstrom et al. [7] 

Malgré la popularité des projets de restauration, actuellement, aucune base de données, permettant de centraliser leur enregistrement, n’est disponible [3], ce qui limite la compréhension du scénario général des projets de restauration récifale en Indonésie, des résultats et apprentissages, ainsi que de leur cadre légal. Face à ce vide, la chercheuse Dr. Tries B. Razak et une équipe de chercheurs internationaux ont publié récemment, sur le magazine scientifique Marine Policy, une révision des projets présents sur le territoire indonésien, ainsi que du cadre légal des projets de restauration en Indonésie. Ce recensement a permis de mettre en évidence la diversité des sources d’enregistrement des projets et de mettre à disposition la première base de données publiquement disponible sur les projets de restauration des récifs indonésiens : rapports, presse, recherche scientifique, entre autres. De plus, cette recherche a également permis de mettre en avant la diversité des organisateurs sur les différents projets : des organisations gouvernementales, des ONG ou encore des organisations privées ou communautaires [3]. 

 

Quelles sont les méthodes de restauration utilisées pour les projets de restauration des récifs indonésiens ?

 

L’étude a recensé 533 projets de restauration de récifs mises en place entre 1990 et 2020, couvrant 29 des 34 provinces de l’Indonésie (Figure 1) soit, au total, environ 120 483 unités de récifs artificiels en Indonésie [3]. 

coral restoration Indonesia

Figure 1 : Projets de restauration des récifs coralliens en Indonésie regroupés par province de 1990 à 2020  (Figure et explications modifiées de [3]).

 

coral restoration Indonesia

Figure 2 : Tendance temporelle des projets de restauration des récifs coralliens en Indonésie. Les tendances temporelles de des projets de restauration sont illustrées par : a) la méthode de restauration ; b) matériaux utilisés (Figure et explications modifiées de [3]).

 

Concernant les méthodes et les matériaux utilisés dans les projets de restauration des récifs indonésiens, les résultats montrent que ceux-ci évoluent et se diversifient au fil du temps [3]. La première méthode de restauration référencée, et la plus répandue, correspond à l’immersion de structures, soit des récifs artificiels (Figure 2a, couleur bleu). Pour cela, les premières structures à avoir été utilisées sont les pneus et le béton (Figure 2b, gris et vert clair) [3]. 

Au début des années 2000, les pneus ont peu à peu été remplacés par des structures en acier (Figure 2, orange claire) [3]. Par la suite, de nombreuses autres structures ont fait leur apparition telles que : la transplantation directe et le biorock * [3]. Ceci, pendant que les nurseries coralliennes continuaient à se populariser (Figure 2a, violet) [3]. Ces évolutions changeantes montrent la diversité entre chaque projet en fonction des disponibilités en matériaux et de l’accessibilité financière [3].

 

Un manque de suivi post-installation et de communication extérieure

 

Cependant, l’étude montre aussi un besoin d’implémenter un suivi des projets, ainsi que de standardiser les méthodologies de suivi écologiques. Seuls 16% des 533 projets recensés mentionnent un suivi post-installation [3].  En effet, de nombreux rapports ne sont pas à jour ou des données concernant la communauté de poissons sur les sites de restauration, l’état physique des récifs ou encore le taux de survie/ d’extension du squelette des transplants coralliens sont absents donc non exploitables [3]. 

Également, bien que l’Indonésie soit reconnue comme étant l’épicentre de la diversité des récifs coralliens [2], de nombreuses informations relatives à leurs activités de restauration ne sont pas accessibles par la communauté scientifique internationale dû au fait que les publications sont pour la plupart en bahasa et plutôt publiées dans la presse indonésienne. C’est donc dans ce sens que les auteurs de l’étude soulignent les efforts que l’Indonésie a devant soi en termes de communication avec la communauté internationale sur leurs projets [3].

 

Et qu’en est-il des politiques et des lois ?

 

L’ensemble de ces projets sont régis par des législations, également examinés par les auteurs. De ces recherches, dix-sept politiques et règlements ont été identifiés comme ayant un lien avec la restauration des récifs en Indonésie. Plusieurs points importants ressortent de ces documents de politique nationale et ministérielle [3] : 

  1. Premièrement, en Indonésie, il est nécessaire de posséder un permis géré et administré au niveau régional, et non forcément national pour chaque restauration récifale envisagée ou toutes activités marines.
  2. Deuxièmement, aucune réglementation stricte ne régit les méthodes et les approches à adopter pour la restauration des récifs. Seule la protection, l’enrichissement et le respect des écosystèmes est amendée par une loi. 
  3. L’ensemble des politiques encourage une participation communautaire pour la planification et l’implémentation des projets, afin de partager la responsabilité entre le gouvernement (central et local) et les communautés locales. 

La législation indonésienne stimule donc une gestion régionale des projets, ainsi qu’une diversité d’acteurs dans la restauration des récifs. 

 

Conclusion

Le besoin d’actions contre la perte des écosystèmes coralliens est urgent. La restauration écologique, l’une des stratégies les plus répandues, a vu un développement rapide depuis les années 80s en Indonésie, résultant en plus de 500 projets de restauration des récifs coralliens. Ceci a été possible grâce à un cadre légal adopté par le gouvernement indonésien, qui se montre très engagé dans la sauvegarde de sa biodiversité marine. Pour la première fois dans la littérature scientifique, cette étude présente une collecte des projets de restauration corallienne menés sur le territoire indonésien ainsi que l’évolution des méthodes utilisées et les cadres légaux. 

En plus de témoigner de la diversité du pays, la collecte des informations a permis la création de la première base de données référençant l’ensemble des projets de restauration des récifs indonésiens. Cette étude souligne également les efforts de communication, de partage des connaissances et des méthodologies qu’il y a à faire de la part de l’Indonésie pour optimiser la gestion des projets et atteindre les objectifs désirés

 

* Biorock : méthodes d’accrétion minérale des structures en utilisant un courant électrique faible à travers l’effet d’anode-cathode.

 

Références bibliographiques :

[1] World Bank, Oceans for Prosperity: Reforms for a Blue Economy in Indonesia. (2021).

[2] L. Burke, K. Reytar, M. Spalding, A. Perry, Reefs at risk revisited in the Coral Triangle, World Resources Institute, Washington DC., USA, 2012, pp. 1–72. https://www.wri.org/research/reefs-risk-revisited-coral-triangle.

[3] T.B. Razak, L. Boström-Einarsson, C.A.G. Alisa, R.T. Vida, T.A.C. Lamont, Coral reef restoration in Indonesia: A review of policies and projects. Marine Policy, 137. (2022)

[4] R. Djohani, The combat of dynamite and cyanide fishing in Indonesia: A strategy to decrease the use of destructive fishing methods in and around Komodo National Park. The Nature Conservancy, Jakarta (1995) 1–47.

[5] R.G. Pearson, Recovery and recolonization of coral reefs, Mar. Ecol. Prog. Ser. 4 (1981) 105–122, https://doi.org/10.3354/meps004105.

[6] Sukarno, Terumbu karang buatan sebagai sarana untuk meningkatkan produktivitas perikanan di Perairan Jepara, J. Perair. Indones. Biol. Budidaya, Kualitas Lingkungan, Oseanografi. (1988) 87–91.

[7] Boström-Einarsson L, Babcock RC, Bayraktarov E, Ceccarelli D, Cook N, et al. Coral restoration – A systematic review of current methods, successes, failures and future directions. PLOS ONE (2020) 15(1): https://doi.org/10.1371/journal.pone.0226631 

 

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